L’industrie allemande signe un accord salarial généreux
L’industrie allemande s’inquiète pour sa compétitivité après la signature d’un accord salarial prévoyant des hausses de salaires de 3,4 % sur un an, plus un chèque de 150 euros, pour les 3,7 millions d’employés de l’automobile, de l’électronique ou de la machine-outil. « Les hausses totales atteignent ainsi près de 14 % en cinq ans, s’est inquiété, mardi, Rainer Dulger, président de l’organisation des employeurs de la branche, Gesamtmetall. La question est de savoir si notre compétitivité internationale peut le supporter. » Le patronat, qui avait proposé des hausses de 2,2 %, a évoqué un compromis « douloureux ». Certes, le secteur de la métallurgie, qui compte des grands noms comme Daimler, Bosch ou Siemens n’est pas à plaindre, même si les plus petites entreprises risquent de souffrir. Selon le syndicat IG Metall, la branche a cumulé au total un bénéfice de 52 milliards d’euros l’année dernière, pour un chiffre d’affaires de 1.000 milliards. A titre de comparaison, sa revendication initiale de 5,5 % représentait un volume de 11 milliards d’euros. Il y a deux ans, les métallos avaient obtenu une revalorisation de 3,4 % pour 2013 puis de 2,2 % pour 2014.
Les salaires ont tout juste retrouvé leur niveau de 2000.
« Avec cet accord salarial, nous stabilisons la conjoncture en Allemagne », a déclaré Detlef Wetzel, président de l’IG Metall. L’économie allemande, en croissance de 1,5 % en 2014 et a priori en 2015, profite de plus en plus de la demande intérieure, soutenue par des hausses de salaires qui rattrapent peu à peu la modération salariale du passé. Selon une étude récente de l’institut de sciences économiques et sociales WSI, proche des syndicats, les salaires réels en Allemagne ont tout juste retrouvé leur niveau de 2000. En 2009, ils étaient encore 4,3 % en dessous du niveau de 2000. Pour l’institut, cet accord devrait servir de référence à d’autres secteurs qui négocient, comme la chimie.
Les employeurs de la métallurgie estiment avoir payé le prix fort, mais se réjouissent d’avoir freiné certaines demandes plus qualitatives d’IG Metall. Celui-ci voulait élargir le dispositif sur le temps partiel en fin de carrière, qui sert fréquemment aux départs en préretraite. Par ailleurs, le syndicat souhaitait élargir les droits à la formation, ce qui n’a été qu’en partie accepté. Pour IG Metall, cela reste « un pas important pour l’organisation du monde du travail ».
Avant l’accord, intervenu au quatrième round, le syndicat avait mis la pression avec des grèves d’avertissement bien suivies. Au total, 850.000 employés ont procédé à des débrayages durant les négociations. Selon Rainer Dulger, « il y avait un risque élevé de grève dure » en l’absence d’accord, ce qui aurait constitué une première depuis 2003. Il juge que les conflits durs qui ont lieu chez Lufthansa et Deutsche Bahn auraient pu motiver une partie du personnel. « Mais le sang-froid des dirigeants d’IG Metall l’a emporté », s’est-il félicité.
L’accord pilote négocié dans le Bade-Wurtemberg doit maintenant être adopté par les autres régions, ce qui devrait être le cas dans la semaine. Signe que la décision ne sera pas facile : les employeurs de Basse-Saxe n’ont pas voté l’accord en question mardi matin. Une démarche rare, même s’il est probable qu’ils l’adoptent finalement, comme c’est la tradition. La région compte certes le géant Volkswagen, qui négocie directement avec IG Metall, mais aussi beaucoup de PME. « Cette hausse représente un surcoût de 150.000 euros par an pour notre entreprise, indique Arndt Brinkmann, patron de G+F Strate, une PME de Hanovre qui répare les machines-outils de VW. Nous allons devoir geler un gros investissement ».
Source : Les Echos