L’embellie se confirme pour l’économie allemande

Posté le 16 Mar 2015

Et si l’Allemagne enregistrait cette année une croissance de 2 % ? Après le 0,7 % du dernier trimestre de l’année 2014, cette hypothèse ne paraît plus invraisemblable. Deux instituts ont déjà sauté le pas : Allianz, qui mise sur 2,1 %, et la Deutsche Bank, qui prévoit une croissance de 2 % (au lieu de 1,4 % précédemment). D’autres instituts s’apprêteraient dans les semaines à venir à réviser leurs prévisions à la hausse. Le gouvernement a relevé les siennes fin janvier à 1,5 %. L’augmentation de 3,4 % des salaires annuels accordée fin février aux 4 millions de métallurgistes montre que le patronat est également optimiste.

Plusieurs raisons à cela. D’abord, il apparaît que la stagnation de la croissance au troisième trimestre 2014 qui a surpris tout le monde était en partie due à Volkswagen. Non que le géant de l’automobile aille mal, au contraire. Mais en 2014, les vacances scolaires en Basse-Saxe ne se sont terminées que le 11 septembre. Résultat : l’usine de Wolfsburg, cœur industriel du groupe, a tourné au ralenti jusqu’à la mi-septembre, impactant l’ensemble de l’économie allemande.

Plus fondamentalement, la croissance s’avère soutenue par la consommation. La baisse du pétrole a permis aux Allemands d’économiser 3,5 milliards d’euros au second semestre, a calculé la Bundesbank. Surtout, non seulement les salaires réels grimpent depuis 2012, mais cela ne semble pas fini. Les 3,4 % accordés aux métallurgistes correspondent à la plus forte augmentation de salaires réels consentie depuis des décennies dans cette branche.

Cela n’empêche pas l’emploi d’augmenter. BMW vient d’annoncer son intention de créer 5 000 emplois en Allemagne en 2015 dont 2 000 à Ratisbonne (Bavière) où le taux de chômage n’est que de 3,5 %. Plus généralement, selon une étude publiée mardi 3 mars par les chercheurs de l’agence pour l’emploi, non seulement le nombre d’actifs augmente en 2014 (de 0,9 % à 42,7 millions d’actifs) mais chacun travaille en moyenne davantage (1 371 heures, + 0,6 %).

La baisse du chômage ne repose donc pas uniquement sur les petits boulots. En fait, tant l’emploi stable (environ 30 millions de personnes) que l’emploi précaire augmentent. Au niveau national, le chômage est repassé en février sous la barre des 7 % (6,9 %). Le volume d’heures travaillées (58,5 milliards d’heures, + 1,5 %) n’a jamais été aussi élevé depuis 1992. Les Allemands sont d’autant plus enclins à consommer qu’ils sont optimistes et que la baisse des taux d’intérêt rend leurs placements moins attractifs. « L’Allemagne joue enfin son rôle de locomotive. (…) C’est de bon augure pour 2015 », commentait mercredi Philippe Waechter, économiste chez Natixis.

A la faveur d’un euro faible

De son côté, le gouvernement soutient également la demande. L’année 2014 s’est achevée avec un excédent public plus élevé qu’annoncé initialement. L’an passé, les comptes publics allemands (Etat fédéral, Etats régionaux, communes et caisses de sécurité sociale) ont engrangé un excédent de 18 milliards d’euros, contre 100 millions en 2013. Pour la première fois, même l’Etat fédéral est excédentaire. Résultat : le ministre des finances, Wolfgang Schäuble, peut lâcher du lest tout en préservant le sacro-saint équilibre budgétaire.

Mardi, il a annoncé qu’il consacrerait 5 milliards d’euros (d’ici à 2018) supplémentaires aux investissements publics. Une somme qui s’ajoute aux 10 milliards déjà annoncés en 2014. 15 milliards sur trois ans, cela commence à ne pas être négligeable : le ministère des finances les compare aux 30 milliards d’investissements publics réalisés jusqu’ici chaque année. Les allocations familiales devraient également recevoir sous peu un coup de pouce. Par ailleurs, sans avoir fourni de chiffre, le ministère des finances a indiqué qu’étant donné les tensions internationales, « la sécurité intérieure et extérieure » bénéficierait de plus de crédits dans le budget 2017, une fois que le ministère de la défense aura clairement indiqué ses besoins.

Enfin, l’euro faible continue de favoriser les exportations. Les nouvelles commandes à l’industrie ont enregistré en février leur plus forte hausse en sept mois, indiquait mercredi l’enquête de l’institut Markit réalisée auprès des directeurs d’achat. « Même si les taux de croissance restent inférieurs aux niveaux observés à la fin de 2014, l’amélioration du sentiment économique et l’euro faible devraient favoriser la demande au cours des mois à venir », estime cet institut.

Mais attention à l’euphorie : « Le rythme de croissance sous-jacente de l’économie allemande est plus faible que ce que les derniers chiffres suggèrent », affirme Ferdinand Fichtner de l’institut d’économie allemande (DIW) de Berlin. A ses yeux, tant les tensions dans la zone euro autour de la Grèce que le conflit avec la Russie constituent des dangers qui sont loin d’être négligeables. Pour le seul premier trimestre, le DIW prévoit, malgré tout, une croissance de 0,5 %.

Source : Le Monde