Coût du travail : match nul entre la France et l’Allemagne

Posté le 28 Oct 2015

Le coût du travail y a progressé à peu près au même rythme depuis la crise.

Le Cice permet au coût de la main-d’oeuvre hexagonale de grimper moins vite ces dernières années, mais la France reste plus chère que l’Allemagne.

En matière d’évolution du coût du travail, la France et l’Allemagne sont au coude-à-coude depuis 2008. Selon une étude de l’Insee publiée ce mercredi, le coût du travail (qui inclut salaires, cotisations salariales et patronales) a grimpé de 12,3 % en France depuis la crise de 2008, alors qu’il a progressé de 15 % en Allemagne. Mais le véritable infléchissement a eu lieu en 2012. Depuis cette date, le coût du travail en France augmente moins vite que celui des Allemands. Entre 2012 et fin 2014, le coût de la main-d’oeuvre dans l’industrie a augmenté de 1,1 % par an en France, contre 3,2 % en Allemagne. « Cette croissance modérée s’explique par la mise en place puis la montée en puissance du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (Cice) », considère Elise Coudin, économiste à l’Insee. Dans le même temps, la modération salariale a pris fin en Allemagne. La différence est un peu moins forte dans les services, mais le mouvement est le même : depuis 2012, le coût du travail a augmenté de 0,8 % par an en France, contre 1,4 % en Allemagne.

Entre 2000 et 2012, c’était l’inverse : le coût du travail progressait plus vite en France qu’en Allemagne, qui était alors considérée comme « le malade de l’Europe ». Les réformes du marché du travail, comme la décentralisation des négociations salariales après la réunification, puis les lois « Hartz » et l’externationalisation de certains processus de fabrication dans les pays d’Europe de l’Est ont permis à l’Allemagne d’améliorer sa compétitivité. Xavier Ragot, président de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) estime ainsi que « la modération salariale allemande est responsable de l’ordre de la moitié de l’écart de performances à l’exportation de la France par rapport à l’Allemagne, l’autre moitié s’expliquant par la montée en qualité de l’industrie allemande. La modération salariale allemande explique aussi près de 2 % du taux de chômage français », poursuit-il. Dans les faits, pour cet économiste, « l’Allemagne a substitué la demande externe en se tournant vers la Chine, les pays émergents et la zone euro, à la demande interne en comprimant les salaires et donc la consommation. »

Différentiel logique

Alors que les deux pays étaient dans des situations comparables à la fin des années 1990, l’Allemagne est aujourd’hui proche du plein-emploi et le pays a le plus fort excédent commercial au monde. A l’inverse, le chômage est élevé en France et la balance commerciale reste largement déficitaire. Le différentiel dans l’évolution du coût du travail depuis 2012 est donc logique : les Allemands, plus compétitifs, voient leurs salaires augmenter plus vite que ceux des Français. Et la mise en place du salaire minimum outre-Rhin au début de l’année devrait encore renforcer cette tendance.

L’augmentation du prix de la main-d’oeuvre s’observe dans toute la zone euro, même si les pays du Sud connaissent une moindre progression depuis 2008. Si l’on regarde cette fois non pas l’évolution mais le niveau, l’Hexagone reste toujours plus cher que la Grande-Bretagne, l’Espagne ou même l’Allemagne avec un coût de 36,20 euros de l’heure mi-2015. Le fruit d’une dynamique salariale qui a longtemps été vive.

Source : Les Echos